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    Le bilan de l’audition centrale 

  

   Les Cahiers de l’Audition, en 2012, présentent une batterie de tests de l’audition centrale en français, créée à Liège au début des années 2000 par Jean-Pierre et Laurent Demanez. Il s’agit du BAC (Bilan Auditif Central), qui est normalisé pour une population âgée de 5 à 80 ans. Cependant, il est conseillé de ne faire passer un premier BAC que vers l'âge de 6 ans, voire 7 ans.

 

Le BAC peut être effectué par un audiologue ou un logopède spécialisé. Il n’est pas remboursé par l’INAMI.

 

   L’évaluation des processus auditifs centraux apporte beaucoup d’informations, mais seulement dans le cadre d’une démarche pluridisciplinaire : en effet, le BAC ne peut pas être interprété à l’état isolé, il est nécessaire d’investiguer au préalable l’audition périphérique et le quotient intellectuel car ces paramètres peuvent influencer les résultats. De plus, les processus auditifs centraux sont en permanente interaction avec d’autres composantes: les capacités attentionnelles et mnésiques, les fonctions exécutives, ainsi que le langage oral et le langage écrit devront donc être évalués.

 

   Les tests du BAC sont composés de pistes sonores, enregistrées sur CD-ROM, qui sont diffusées dans un casque audio. Le local de passation doit être le plus silencieux possible, voire insonorisé. Il est possible de ménager de courtes pauses entre les épreuves, car celles-ci demandent une attention soutenue efficiente.

 

Composition du BAC (Bilan Auditif Central):

 

   Il existe une version longue et une version courte de la batterie. C’est la version courte qui est couramment utilisée. Elle est constituée de trois tests :

 

Le Lafon 60/Lafon dans le bruit :

 

   Le patient doit répéter un par un des mots uni-syllabiques, qui sont présentés en écoute binaurale. Une liste de 30 mots est présentée au patient par suites de dix items, alternativement sans bruit, puis avec bruit. L’intensité du bruit de fond est égale à celle du stimulus.

 

   On obtient deux scores sur 30, l’un pour les mots sans bruit, l’autre pour les compétences en présence de bruit, pour chacune des deux listes. Seule la répétition du phonème ciblé par le test est cotée comme réussie ou non, le reste du mot n’est pas pris en compte. Cependant, il est utile de noter les réponses dans leur entièreté, de façon à prendre connaissance des phonèmes le plus souvent mal reconnus.

 

   Ce test évalue la capacité de reconnaissance des phonèmes dans le silence et dans le bruit, qui nécessite un décodage phonétique efficient.

Si ce processus est touché, on observera le plus souvent des absences de réponse, des substitutions ou des omissions de phonèmes.

 

Le test d’écoute dichotique :

 

   Deux informations verbales sont passées simultanément dans le casque. Celle pour l’oreille gauche est différente de celle destinée à l’oreille droite. Leur durée est parfaitement similaire, et l’intensité sonore doit elle aussi être la même dans les deux oreilles.

Le test est composé de 50 paires d’items (gauche/droite), réparties en listes de dix. Il est demandé au patient de répéter les items qu’il entend dans l’oreille désignée (OD) au préalable, ou de répéter les deux items perçus (Oreille Non Désignée, OND).

 

   Pour les enfants de moins de huit ans, on diffuse dans chaque oreille des syllabes, des substantifs bisyllabiques, ainsi que des séquences de deux chiffres. Le test dit « pour adultes Â», s’adresse aux patients de plus de huit ans. Les listes de chiffres comprennent des séquences de deux et trois chiffres, et les syllabes sont remplacées par des suites de deux adjectifs unisyllabiques.

   Chaque liste est présentée en oreille désignée et en oreille non désignée, à l’exception de la liste des substantifs, qui est uniquement proposée en oreille non désignée.

 

   L’épreuve avec désignation de l’oreille teste les capacités de séparation binaurale, alors que l’épreuve sans désignation de l’oreille permet d’évaluer l’intégration binaurale. L’indice d’aptitude dichotique, qui regroupe les deux compétences, correspond au total de réponses complètes à droite et à gauche, en pourcentages. 

 

   Si l’écoute dichotique est touchée, certains types d’erreurs sont assez fréquents : il s’agit des omissions, des télescopages, et des intrusions. Un patient effectue un télescopage quand il fusionne une syllabe d’un mot avec la syllabe d’un autre.  S’il répète une suite de chiffres en y introduisant l’un des chiffres qui a été prononcé dans l’autre oreille, il s’agit d’une intrusion.

 

   La prévalence d’oreille est aussi calculée : dans le traitement du langage dans le silence, la prévalence est à l’oreille droite chez la population tout-venant, mais chez les personnes avec TTA(C) cette prévalence droite est souvent davantage marquée par limitation des performances au test pour l’oreille gauche. En effet, la plupart des informations provenant de l’oreille gauche doivent passer par l’hémisphère droit, avant d’être traitées dans l’hémisphère gauche, dominant quant au langage. C’est pourquoi un indice de prévalence est calculé dans le test dichotique, afin de savoir si la prévalence est significative. Selon Keith et Anderson, en 2007, en cas de différence marquée entre les scores pour les oreilles droite et gauche au test dichotique, un mauvais transfert interhémisphérique sera donc suspecté (Waterlot & Collette, 2012, Demanez & Demanez, 2011, Groupe Directeur Canadien Interorganisationnel en orthophonie et en audiologie [GDCI], 2012).

 

Les tests des configurations temporelles :

 

  Ces tests permettent d’explorer les capacités de reconnaissance des variations de fréquence (PP : Pich Pattern) et de durée (DP : Duration Pattern).

 

   Lors du test concernant la fréquence, on fait écouter au patient une séquence de trois patterns de hauteur, et celui-ci doit énoncer, dans l’ordre, la hauteur de chacun des patterns. Il n’existe que deux hauteurs : aigu/haut et grave/bas. Le principe est le même lors du test portant sur la durée, qui contient, quant à lui, des suites de trois patterns longs ou courts.

 

   Le test évalue les compétences du cortex auditif droit, en ce qui concerne la perception de la hauteur et de la durée. Les deux épreuves permettent aussi d’explorer l’efficience du transfert interhémisphérique, car le fait de devoir verbaliser nécessite un transfert de l’information perçue à l’hémisphère gauche, dominant quant au langage. Chez les enfants de moins de huit ans il est possible d’accepter une réponse fredonnée. Cependant, dans ce cas, le transfert interhémisphérique n’est pas investigué, car seul l’hémisphère droit intervient.

 

 

Les limites du BAC :

 

   Le test ayant été enregistré à Liège, les informations verbales sont prononcées avec l’accent local. Cet accent peut influencer les résultats du bilan des personnes originaires d’une autre région, si l’examinateur ne tient pas compte des items concernés.

 

   S’il existe une différence de seuil d’audition de plus de dix décibels entre les deux oreilles, le test d’aptitudes dichotiques ne fournit plus d’informations. De plus, en cas de perte auditive périphérique supérieure à 75 dB, l’interprétation du bilan n’est plus significative. Cependant, pour une perte auditive moins importante, la batterie est toujours exploitable, en réglant l’intensité des stimuli sonores en fonction du degré du déficit auditif périphérique.

 

CONCLUSION :

 

   Le BAC permet donc de vérifier le bon fonctionnement des processus auditifs centraux : l’efficacité du décodage phonétique est évaluée grâce au test de Lafon, la séparation et l’intégration binaurales sont investiguées par le test d’écoute dichotique, et la reconnaissance de configurations temporelles est estimée via le test de patterns de fréquence et de durée. Le transfert interhémisphérique est, quant à lui, contrôlé durant le test d'écoute dichotique et la reconnaissance de patterns temporels. Il existe un test de l’interaction binaurale dans la version longue du BAC, mais, selon Demanez, en 2012, les résultats sont rarement déficitaires pour les enfants. Ce test n’est donc pas présent dans la version courte du BAC, utilisée dans la pratique courante.

 

   Les informations apportées par le BAC doivent être exploitées dans le cadre d’une évaluation et d’une prise en charge globales des difficultés de l’enfant.

   Les résultats au BAC permettront au logopède de savoir s’il doit ajouter un entraînement des processus auditifs centraux Ã  la rééducation des autres troubles éventuellement diagnostiqués.

 

 

 

Voir La rééducation du TAC/TTA

 

 

 

 

 

 

Publié le 01/12/2015.

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